Ici, l’art ne se suspend pas en silence : il palpite sous la peau, il vibre dans l’air. Il respire encore, malgré un monde qui voudrait le réduire à un simple éclat, un souffle effacé au bord du tumulte.
Dans un monde fracturé par les tensions politiques, les inégalités économiques, et le mépris du vivant, l’édition 2025 invite à un pas de côté. Dans un geste collectif, elle met en lumière la richesse de nos humanités. Une respiration commune qui redonne vie à notre capacité à nous émerveiller, ce que les artistes savent révéler avec douceur et force, quand les mots ne suffisent plus.
Il existe des lieux où l’on apprend à ressentir autrement. Des lieux où chaque exposition, chaque concert, chaque rencontre, laisse une empreinte douce et lumineuse. MEMENTO a forgé son ADN sur cette histoire émotionnelle, faite de création, de communion et d’ouverture aux sensibilités. Dans cet ancien carmel, les souvenirs se déposent. Ils s’infiltrent dans les murs, nourrissent les récits partagés. L’art y tisse une résistance discrète, mais tenace.
L’exposition 'VIVRE' célèbre ces sentiments bruts, ces souvenirs heureux et ces blessures partagées. Une invitation à honorer ce qui, en nous, persiste : l’amour, le manque, la joie fulgurante, les liens tendus et les complicités solidaires.
Pensée comme un espace immersif et évolutif, notre relation au vivant s’éveille. Un corps à corps avec le lieu s’engage, il s’ancre dans son architecture et son histoire, tout en résonnant avec les enjeux de notre temps. En croisant peinture, sculpture, installation et vidéo, l’exposition ouvre un dialogue sensible entre les formes et les idées, où l’art devient révélateur de notre condition humaine.
Dès la chapelle, Sebastian Kite propose une expérience sensorielle et méditative. L’architecture se transforme sous nos pas, nous projetant dans un entre-deux, entre perception intime et espace partagé. Cette immersion fait vaciller nos repères, pour mieux inviter à la rencontre : avec soi, avec les autres.
De cette exploration intérieure naît le lien - invisible et vibrant – peint par Cedrix Crespel. À travers une correspondance entre figuration et abstraction, l’artiste fait surgir l’amour comme une force vitale, celle qui unit, transcende, façonne.
Mais que devient le vivant lorsqu’il est placé sous un écrin de verre ? Ali Cherri, dans son œuvre à la fois politique et poétique, pose cette question troublante. Préserver, c’est parfois enfermer.
Cette ambivalence du monde - entre contrôle et chaos – s’intensifie avec DEMOCRACIA. Leur performance vidéo détourne les codes sociaux révélant les schémas de domination et la banalisation de la violence sociale.
S’exhalant de toute tension, Jérôme Souillot choisit l’écoute, celle du silence habité de MEMENTO. Il trace les contours subtils des fantômes du lieu, des présences des œuvres passées, ces résonances affectives planent dans les espaces d’exposition. Ses œuvres sont comme des murmures discrets, une empreinte vivace qui circule entre l’artiste et le public.
L’attention à la transformation se prolonge avec l’œuvre organique de Michel Blazy. En constante évolution, elle dévoile la beauté fragile du vivant rappelant que 'VIVRE', c’est aussi accepter l’impermanence.
Et lorsque tout chavire, il reste la danse. Chez Carlos Aires, elle devient un acte de résistance. En détournant les figures de l’autorité dans une chorégraphie saisissante, l’artiste dévoile l’absurde et met à nu les tensions dissimulées.
Dernière pulsation de l’exposition, son œuvre questionne nos regards, nos croyances et remet en question les mécanismes du pouvoir révélés et déplacés par le geste artistique.
Sous la surface du monde, l’art continue de battre. Il porte nos fractures intimes, nos complicités lumineuses. L’exposition 'VIVRE' est un refuge impalpable : un chant pour l’émotion, une ode à l’élan vital dans un univers incertain. MEMENTO devient ce territoire de résistances sensibles, un sanctuaire des mémoires heureuses et des engagements palpitants.
'VIVRE', c’est croire qu’au creux de chaque faille, dans chaque battement, un monde plus délicat demeure possible. C’est faire, encore et toujours, de l’émotion un acte politique et de l’art une force contre l’oubli.
Cette édition 2025 est habitée par la mémoire de William Gourdin, commissaire d’exposition dont l’intelligence vive et l’espièglerie illuminaient avec ferveur nos valeurs humaines et artistiques.